J'aperçus mon adversaire tomber à la renverse, faire une roulade contrôlée et retomber sur ses pattes, prêt à repartir. Son nain de jardin le couvrait toujours avec ses cailloux, et mon bras fut grêlé de gravier ; je ressentis une douleur étouffée, comme si mon membre avait été protégé par une armure, mais je savais pertinemment que dès qu'il aurait regagné sa place, la souffrance m'assènerait sans pitié. Je choisis de tenter le tout pour le tout : quitte à pleurer sur mon corps meurtri, autant que mon bras fatigué joue les martyrs, pour cette fois. Je repris le contrôle et lui ordonnai de retourner se fondre dans les hautes herbes.
Je savais pertinemment que Tim ne serait pas dupe : il ne se ferait pas avoir deux fois par le même coup. Mais avec un peu de chance, s'il se préparait seulement à une chute imminente, je bénéficierai tout de même d'un effet de surprise. Je fronçai les sourcils, concentrée sur ma tâche. D'un même mouvement, je me mis à courir en direction de mon adversaire, bras gauche contre mon visage pour me protéger de toute chute de pierre intempestive et donnai à mon membre libre le signal du départ.
Je ne pouvais que supposer qu'il agissait comme je le souhaitais, car je ne le voyais pas plus que mon adversaire, et je ne ressentais en sa direction qu'une vague de douleur diffuse, comme si, à force de ressentir la douleur dans mon membre manquant, une barrière s'était dressée pour me préserver. Voilà en tout cas ce que j'avais prévu : il devait se propulser au ras des herbes folles, tendre la main à plat, et cogner avec la tranche de la paume en plein sur le tendon d'Achille.
Espérons que cela soit suffisamment douloureux pour que je puisse placer le coup de grâce...